Modifié le 29 mars 2025 par epargnebourse.fr
La dette publique française est au cœur des préoccupations économiques et financières. En augmentation quasi continue depuis plus de 40 ans, elle soulève des questions fondamentales sur l’organisation de l’État, le financement des dépenses publiques et la soutenabilité des finances publiques. Son évolution influence directement la politique budgétaire, les marchés financiers et l’épargne des citoyens, rendant son analyse essentielle pour comprendre les défis économiques à venir.
Mais au-delà des chiffres, c’est aussi l’avenir du pays et des Français qui est en jeu. Cette dette, mal maîtrisée limite de plus en plus la capacité d’action de l’État et alourdit encore davantage le fardeau fiscal des Français. Les jeunes contribuables, en particulier, devront assumer les conséquences d’un endettement hérité de plusieurs décennies de décisions politiques souvent marquées par le court-termisme, le clientélisme électoral et l’absence de réformes structurelles.
Analysons la situation.
Sommaire
La dette Française (au sens de Maastricht)
La dette au sens de Maastricht est l’indicateur utilisé dans l’Union européenne pour évaluer de façon homogène la dette publique des États membres. Elle correspond à la dette brute consolidée des administrations publiques :
- État,
- Collectivités locales : Régions, départements, …
- Administrations de sécurité sociale : Maladie, Chômage, Retraite
La dette française est exprimée en valeur nominale et hors passifs financiers internes à ces entités.
Dans cet article, j’analyse la dette en valeur. Un autre article portera sur la dette publique exprimée en pourcentage du PIB
Les données de cet article proviennent essentiellement de l’Insee. Si vous souhaitez conduire vos propres analyses, elle sont disponibles sur le site de l’Insee dans la rubrique « comptes nationaux trimestriels » :
https://www.insee.fr/fr/metadonnees/source/serie/s1185
L’évolution de la dette publique en France (au sens de Maastricht)
Dette publique française 2024
Le derniers chiffres de la dette Française publiés par l’Insee pour l’année 2024 sont :
- Fin T4 2024 : 3305.3 Mds €
- Fin T3 2024 : 3301.4 Mds €
- Fin T2 2024 : 3229.7 Mds €
- Fin T1 2024 : 3160.8 Mds €
Sur le quatrième trimestre de 2024, la dette publique Française a donc augmentée de 3.8 Mds € en trois mois. Un rythme heureusement beaucoup plus faible que celui frénétique du T3 de 2024 qui était de :
- 71.7 Mds € en trois mois
- 785 Millions € par Jour
- 32.74 Millions € par Heure
Dette publique française historique
Le premier graphique ci-dessous représente l’évolution de la dette publique Française depuis 1978. Ce graphique des données de l’Insee est terrible tant la croissance de la dette Française semble être hors de tout contrôle.

Le second graphique, lui aussi réalisé à partir des données de l’Insee donne une vue trimestrielle. Comme l’Insee ne communique les données trimestrielles qu’à partir de T1 2000, le graphique couvre une période plus courte.
J’ai ajouté le cumul de la dette publique Française créée pendant le mandat de chacun des 3 derniers présidents. Le président Macron avec 1020 Milliards € a déjà fait pire à lui seul que ses deux prédécesseurs réunis.

Exprimée en valeur, la dette publique continue donc de progresser très rapidement. Et cela, dans ce qui ressemble à une indifférence ou une résignation assez générale. Et pourtant, les Français, en particulier les jeunes générations, celles qui auront à assumer la plus lourde part des conséquences de cette dette seraient bien avisées d’exiger des changements rapides.
L’acceptation collective de cette croissance ininterrompue de la dette, et de façon plus large ce mépris pour les générations suivantes est pour moi un des grands mystères de la société Française des 40 dernières années.
Dette publique Française 2025
Maintenant que l’évolution et le niveau actuel de la dette publique sont clairs, essayons de nous projeter à fin 2025. Quelle pourrait-être le niveau de la dette Française en 2025 ?
Pour estimer la situation future, il est important de considérer la situation actuelle de la France qui est marquée par :
- La perte constante de productivité de l’économie Française depuis plusieurs années
- Une croissance économique qui vient de passer en territoire négatif au T4 2024 (-0.1%)
- Une absence totale de réforme de la dépense publique depuis de très nombreuses années. Aucun effort pour réformer l’état, ni les collectivités territoriales.
- Une folie normative et réglementaire qui ralenti tout, complique tout, décourage la prise d’initiative
- Et depuis cet été, et encore pire depuis cet automne. L’inefficacité de l’action politique en matière économique a fait place à ce qu’il faut bien malheureusement appeler une incurie politique totale. Une déconnection absolue du président, des ministres, députés, sénateurs qui semblent vivre dans un univers parallèle. Exposant largement leur manque d’intérêt pour le pays, et leur absence de volonté de rechercher et de mettre en place la moindre solution.
Dans de telles conditions, la dérive des comptes publiques devrait assez logiquement continuer en 2025 au rythme de l’année 2024, voir pire. La dette publique Française 2025 pourrait alors approcher, ou même dépasser les 3500 Mds € en fin d’année.
Autres aspects liés à la dette publique
Continuons notre analyse de la dette en abordant trois autres indicateurs importants :
- La dette nette : Variante de la dette au sens de Maastricht
- Les engagements hors bilan : Une autre bombe à retardement, encore plus grosse que la dette elle même
- La dette implicite de l’état : Une mesure supplémentaire du risque potentiel, plus difficile à cerner mais nécessaire pour avoir une vision globale
Pour mieux comprendre l’importance de ces sujets, laissez moi prendre une image :
- La dette que nous venons d’analyser, celle au sens des critères de Maastricht serait pour une famille : Constituée de son emprunt immobilier, de ses crédits à la consommation et crédits automobiles.
- La dette nette : Serait la dette, réduite du montant figurant sur les comptes bancaires, les placements facilement vendables (livret A, placement monnétaires, …)
- Le hors bilan : Serait constitué du montant que l’on a par exemple prévu pour refaire la toiture dans 5 ans car elle commence à fuire on l’on sait que si l’on ne fait pas ces travaux la maison deviendra rapidement inhabitable. Le hors bilan, n’est pas de la dette, mais il est assez largement incontournable. Il porte aussi sur des montants qu’il ne sera normalement jamais nécessaire de dépenser en totalité (par exemple si l’on s’est porté caution pour un proche).
- La dette implicite : Pour une famille, cela serait le financement des futures études supérieures des enfants. On ne sait pas combien cela va coûter, on ne sait même pas exactement quand cela arrivera, et si cela arrivera. Mais l’on sait que si ce besoin se produit, il faudra le financer d’une manière ou d’une autre le moment venu.
A ce stade de l’article, je voudrais insister sur un point. Pour une familles, pour une entreprise tout comme pour l’état. Il n’est pas grave d’avoir des dettes, des engagements hors bilan, et de la dette implicite. Cela est même généralement bénéfique et souhaitable.
Mais, tout dépend à la fois de la qualité de la dette (au sens large) et de la soutenabilité de la dette (au sens large). J’analyserai ce sujet dans un autre article.
Le moins que l’on puisse déjà dire est que la dette publique Française en 2025 n’est ni de qualité (elle finance trop de fonctionnement et pas assez d’investissement), ni soutenable (elle augmente de façon incontrôlée). La situation est encore pire en considérant le hors bilan.
Continuons cet article avec l’analyse de la dette nette, du hors bilan et de la dette implicite.
La dette publique Française nette
Comment l’INSEE calcule la dette nette ?
L’objectif de calculer la dette nette est d’évaluer l’endettement réel en tenant compte des ressources financières immédiatement mobilisables pour rembourser une partie de la dette. Elle est obtenue en soustrayant certains actifs financiers de la dette brute (dette au sens des critères de Maastricht).
Les actifs pris en compte sont principalement ceux qui peuvent être mobilisés rapidement pour rembourser la dette, à savoir :
- Dépôts bancaires de l’État et des administrations publiques,
- Titres de créance détenus par l’État,
- Prêts accordés par l’État,
- Autres actifs liquides détenus par les administrations publiques.
évolution de la dette nette et de la dette Française
Le graphique suivant présente l’évolution conjointe de la dette française (au sens de Maastricht) et de la dette nette.
L’analyse des deux courbes montre que raisonner en dette publique nette ou en dette publique ne change pas les conclusions. Les deux évoluent en parallèle et l’écart est de 10% seulement.
Inversement, il existe d’autres engagements de l’état qui ne sont pas des dettes à proprement parler mais qui sont beaucoup plus lourds. Parlons donc du « hors bilan » et de la dette implicite.
Engagements hors bilan de l’État français
Les engagements hors bilan regroupent des obligations potentielles qui ne figurent pas directement dans la dette publique. On trouve ces informations dans un rapport de la cours des comptes « La situation financière de l’État à fin 2023 » publié en Avril 2024.
Selon ce rapport officiel, la valeur des engagements hors bilan est en augmentation de 267 Md€ sur l’année 2023 et atteint plus de 4000 Md€ fin 2023. Ce qui ajouté à la dette nette donne un total de 7000 Mds €.
Les engagements hors bilan, recensent la valeur des engagements financiers pris par l’État, mais qui ne figurent pas parmi ses dettes car la charge correspondante n’est qu’une éventualité, ou elle ne peut pas être chiffrée avec précision (ce qui n’est pas forcément rassurant).
Selon la cours des comptes, les engagements hors bilan de l’état Français portent sur :
- Engagements de retraite des fonctionnaires de l’État et assimilés : 1800 Mds€ (45% des 4000 Mds €)
- Garanties accordées par l’état : 1520 Mds€ (38 % de 4000 Mds €) par exemple pour garantir les emprunts des hôpitaux publiques, de la Sncf, … Ces montants n’ont pas vocation à être dépensés en totalité, ni même en grande partie.
- Autre engagements (Internationaux, …) : 680 Mds € (17 % des 4000 Mds €). Dont par exemple 126 Milliards pour le Mécanisme Européen de Stabilité (MES).
En cumulant la dette publique nette + les engagements hors bilan, nous sommes donc à 7000 Mds €. Mais il existe un troisième étage à la fusée, il s’agit de la dette implicite.
Dette implicite de la France : les engagements futurs hors comptabilité
La « dette implicite » est assez mal nommée. Ce n’est pas une dette car aucune dépense n’a été engagée et aucune somme n’a été empruntée. C’est plutôt l’évaluation d’un risque financier pouvant ultérieurement peser sur le budget de l’état. La dette implicite repose seulement sur des hypothèses économiques et démographiques, et non sur des engagements contractuels précis. Le risque identifié, même s’il se matérialise ne sera d’ailleurs pas forcément à la charge totale de l’état (et des contribuables).
Ces montants sont par définition moins précis, plus hypothétiques. Avec le temps, ils peuvent évoluer de façon favorable, ou défavorable, voir très défavorable en cas de grave crise. Il est donc bon de les connaître.
Il est tentant pour certains de faire un total dette nette + Hors Bilan + Dette implicite. Cela n’est pas correcte, il s’agit de choses différentes. Il est important de comprendre les trois montants, mais ils sont de nature très différente.
Coût du vieillissement démographique (hors retraites des fonctionnaires)
Il est bien difficile de quantifier l’impact de ce phénomène, mais il est clair que la population Française vieillit et que cela aura un coût dans le futur. Un coût supérieur à ce qui est déjà enregistré dans la dette publique et dans le hors bilan.
Selons les estimations (voir Conseil d’Orientation des Retraites (COR), projection 2023) :
📌 Montant estimé : 1 000 à 1 500 milliards d’euros sur 30 ans
📌 Détail : Inclut les retraites du secteur privé, les dépenses de dépendance et l’augmentation des coûts de santé liée à l’âge.
Ces dépenses ne seront pas forcément à la charge de l’état et des contribuables. Mais il faut que l’état prenne les bonnes décisions pour mettre ce sujet sous contrôle.
Transition énergétique et écologique
📌 Montant estimé : 700 milliards d’euros d’ici 2050
📌 Détail : Dépenses publiques nécessaires pour la neutralité carbone (rénovation thermique, infrastructures bas carbone, soutien aux énergies renouvelables).
📌 Source : Cour des comptes, Rapport sur la transition écologique
Là aussi, ces dépenses ne seront pas forcément à la charge de l’état et des contribuables. Mais il faut que l’état prenne les bonnes décisions pour mettre ce sujet sous contrôle.
Soutien aux collectivités locales et à la Sécurité sociale
📌 Montant estimé : 500 milliards d’euros sur 30 ans
📌 Détail : Transferts croissants pour couvrir les déficits structurels de l’Assurance maladie et de certaines collectivités locales en difficulté.
📌 Source : Commission des comptes de la Sécurité sociale
Là aussi, ces dépenses ne seront pas forcément à la charge de l’état et des contribuables. Mais il faut que l’état prenne les bonnes décisions pour mettre ce sujet sous contrôle avant d’avoir à payer les conséquences éventuelles.
Coût des crises économiques et financières futures
Tout comme l’état est intervenu en 2008 (crise des sub primes), en 2011 (crise de la dette Grecque), en 2020 (crise du Covid), il est certain, qu’il devra intervenir à d’autres moments, pour d’autres crises dans le futur.
📌 Montant estimé : variable, mais potentiellement 10 à 20 % du PIB sur 10 ans en cas de choc majeur
📌 Détail : En cas de crise financière ou économique majeure, l’État pourrait être amené à injecter des centaines de milliards pour stabiliser l’économie (exemple : crise de 2008, COVID-19).
📌 Source : Banque de France, analyse des stabilisateurs budgétaires
Là aussi, ces dépenses ne seront pas forcément à la charge de l’état et des contribuables. Mais il faut que l’état prenne les bonnes décisions pour mettre ce sujet sous contrôle avant d’avoir à payer les conséquences éventuelles.
Conclusion
Le gouvernement (au sens large) de la France a été pris d’une fièvre dépensière incroyable sous François Mitterrand, en 1981. Plus de 40 ans sont passés depuis et aucun gouvernement n’a été capables de produire un seul budget en équilibre. L’accumulation des déficits a généré une dette de plus de 3300 Mds € et les Français consacrent une part croissante de leurs impôts au paiement des intérêts (50 Md€ en 2023).
En plus de cette dette, le hors bilan de 4000 Mds € pèsera lui aussi sur l’avenir du pays et sur celui des Français.
La dette implicite est un sujet différent, elle concerne davantage la société Française dans son ensemble. L’état a un rôle fondamental. Son action par la loi, par la régulation permet de :
- minimiser les montants à risque
- diminuer la probabilité d’apparition de ces risques
Encore faut-il que l’état, les politiques agissent en se souciant du moyen et long terme et de façon avisée ce qui n’a pas été le cas depuis trop longtemps.
L’histoire économique nous montre qu’ils y a principalement deux sorties possibles à cet empilement de dette et de risques (hors bilan + dette implicite) :
- La prise de conscience et l’action préventive : Dans de nombreux pays, les citoyens et les dirigeants politiques ont pris conscience que leur pays ne pouvait pas continuer à s’endetter et à insulter l’avenir. Ils ont lancé des programmes de réforme très efficaces. Beaucoup de pays l’on fait, sans drames et avec d’excellent résultats.
- Continuer dans l’irresponsabilité jusqu’au chaos : Parfois, les citoyens, les gouvernants n’ont pas la lucidité, ou pas la volonté de résoudre les problèmes de façon pro-active. Le désastre est au bout de la route. C’est à mon avis le chemin le plus probable pour la France. L’histoire en générale, et l’histoire économique sont jalonnés de désastres qui n’aurait jamais dû se produire La France subirait alors un scénario à la Grecque : vente des actifs nationaux ayant encore de la valeur, licenciement massif de fonctionnaires, baisse massives des prestations sociales y.c des pensions de retraite, hausse explosive du chômage, …
Cet article n’est pas joyeux, mais j’espère qu’il vous a apporté un éclairage sur la situation des finances publiques en France.
Pour vous tenir informés de la situation de l’économie Française et de celle de la zone euro, vous pouvez aussi consulter :
Et si vous avez besoin de rafraîchir ou améliorer vos connaissances économique, c’est ICI.
A vous de jouer !
Cet article touche à sa fin, et j’espère qu’il vous a apporté des pistes de réflexion intéressantes. Si vous l’avez trouvé utile, n’hésitez pas à le partager en un clic :
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